
Zone euro : S&P Global table sur une reprise « alimentée de l’intérieur » en 2025
Zone euro : S&P Global table sur une reprise « alimentée de l’intérieur » en 2025
La dernière étude Economic Research de S&P Global, publiée le 24 juin, rebat les cartes des prévisions pour la zone euro. Le scénario baptisé Strength from Within mise sur des bilans privés solides, une consommation résiliente et un investissement en rattrapage pour compenser l’onde de choc commerciale venue des États-Unis.
En effet, selon l’agence le PIB grimpera de 0,8 % en 2025 puis de 1,1 % en 2026, malgré la volatilité des exportations.
En effet, la croissance a surpris au premier trimestre 2025 : +0,6 % sur trois mois, soit 2,5 % annualisé. Moins de la moitié provient des envois de médicaments vers les États-Unis, accélérés avant les droits de douane ; le reste vient du rebond de la consommation (+0,2 %) et surtout de l’investissement des entreprises (+2,6 %).
S&P Global salue la remontée du taux d’utilisation des capacités et note que l’investissement reste encore 10 % sous son niveau pré-Covid, laissant un important potentiel de rattrapage.
Pour l’investisseur particulier, suivre l’indice paneuropéen Euro Stoxx 50 permet de capter ce réarmement productif, les poids lourds industriels profitant directement de la modernisation des chaînes de production.
L’agence intègre déjà la montée en puissance de deux leviers budgétaires : un plan d’infrastructures allemand d’environ 1 000 milliards d’euros sur douze ans et une hausse coordonnée des dépenses de défense à hauteur de 800 milliards sur quatre ans.
Toutefois, les projets restent flous : Berlin doit encore préciser les appels d’offres, et l’UE affine son programme ReArm pour sécuriser la production locale d’armement. Tant que les calendriers manqueront de visibilité, S&P Global maintiendra une prime d’incertitude sur le multiplicateur fiscal.
Le chômage recule à 6,2 %, un plus bas historique, tandis que l’emploi total dépasse de 7,2 millions de postes son niveau de 2019. Près de la moitié des créations viennent d’Espagne et de France ; l’Allemagne pâtit encore de pertes dans la construction.
Cependant, les tensions salariales se calment : les hausses négociées tombent à 2,4 % en début d’année contre 4,1 % fin 2024. Cette modération limite la spirale prix-salaires et soutient le pouvoir d’achat, ciment de la consommation domestique.
Selon Trading Economics, la première estimation du PIB confirme déjà la surprise positive du premier trimestre, confortant l’idée d’un socle interne robuste.
Comme le rappelle S&P Global dans son analyse, le recul coordonné des prix de l’énergie et l’appréciation rapide de l’euro font replonger l’inflation totale à 1,9 % dès 2025, puis 1,7 % en 2026. Le cœur resterait proche de la cible de la BCE.
S&P Global avertit toutefois : un Brent durablement au-delà de 66 $ ou l’échec des négociations tarifaires pourraient rajouter 0,3 point à l’indice des prix. À l’inverse, un détournement d’importations chinoises vers l’Europe exercerait une pression désinflationniste.
Lagarde: As inflation is set to stabilise around our 2% target, the Governing Council recently decided to lower key interest rates again by 25 basis points.Amid exceptional uncertainty, we’ll follow a data-dependent and meeting-by-meeting approach to determining monetary policy.
— European Central Bank (@ecb) June 23, 2025
Après huit baisses consécutives, la banque centrale a figé le taux dépôt à 2 %. Christine Lagarde estime la politique « au bon niveau » et le marché n’attribue plus que 50 % de probabilité à une nouvelle détente en septembre. Reuters rappelle que le dernier geste d’assouplissement date du 5 juin.
La courbe des taux s’est accentuée sous l’effet du resserrement quantitatif, mais l’excès de liquidité bancaire reste confortable à 2,8 trillions d’euros, limitant le risque de credit-crunch.
S&P Global chiffre l’impact actuel des « tariffs » américains (10 % sur tous les biens, 25 % sur les voitures et les médicaments, 50 % sur l’acier) à –0,3 point de PIB. Cependant, si Washington généralisait un prélèvement de 50 %, la zone perdrait 1,1 point sur 2025-2026.
Les pays les plus exposés seraient l’Allemagne (automobile) et l’Italie (métallurgie). En coulisse, Bruxelles prépare un paquet de contre-mesures de 95 milliards, qui gonflerait l’inflation de 0,2 point mais protégerait l’appareil productif.
Par ailleurs, l’évolution du Brent reste critique. Les hypothèses de S&P Global reposent sur 60 $ en 2025 et 65 $ en 2026 ; un choc de 10 % renchérirait l’inflation jusqu’à 2 %. Au-delà, la BCE pourrait devoir remonter les taux dès 2027 pour garder la cible en ligne de mire.
Sources
Auteur : Baptiste Leclercq
Date de publication : 27 June 2025